La journée mondiale des zones humides a lieu le 2 février 2025, mais en France ces lieux spéciaux sont célébrés chaque mois de février. C’est pourquoi Lauragais Tourisme et l’intercommunalité des Terres du Lauragais se sont associés, samedi 15 février, afin de proposer une sortie sur ce thème au lac de la Thésauque. Plus d’une trentaine de participants ont répondu présents pour marcher aux côtés d’Anthony et de Patrick, nos guides pour la matinée.
A 9h00, le soleil est déjà au rendez-vous : les participants arrivent petit à petit. Anthony et Patrick se présentent. L’un est responsable du département des espaces verts, l’autre dirige depuis 30 ans le chantier d’insertion qui travaille sur le site. Patrick connaît donc le lac comme sa poche. Tous deux travaillent à Terres du Lauragais, cette intercommunalité qui a fait le choix de candidater en 2023 au label national « Territoire engagés pour la Nature ». Ils sont passionnés et ont envie de nous transmettre ce matin-là leur passion, le fruit de leur travail mûrement réfléchi, coordonné et planifié.
Faire cohabiter l’humain et les animaux
Même si ce lac est très fréquenté en été car la baignade y est autorisée, cela n’a pas empêché Anthony et son équipe de réfléchir à une gestion en faveur de la biodiversité. L’un et l’autre ne sont pas incompatibles après tout ! A partir de la zone où sont implantés les agrès sportifs, et sous les yeux d’une douzaine de grands cormorans, Patrick nous montre un superbe peuplier argenté, un des arbres remarquables du lac.
Grand Cormoran ®Bernard Laviron
« Nous rentrons, à partir de là, sur un futur espace naturel sensible » prévient Anthony. Il nous explique différentes actions qu’il a mises en place : laisser certains arbres morts en place, qui permettent d’abriter une immense biodiversité comme le grand capricorne, impressionnant, mais totalement inoffensif ! Anthony a aussi noué des partenariats, notamment avec le Museum d’Histoire Naturelle. « Pour que le site devienne un Espace naturel sensible, le suivi des populations est primordial. Ainsi, on recense, on compte, et on transmet toutes nos données aux scientifiques. Récemment, on a pu observer la couleuvre coronelle », dit Patrick. Nous avons disposé des plaques à reptiles sur certaines parties du site qui permettent un suivi de ces populations ».
préserver les écosystèmes
La balade continue, et nous nous arrêtons à nouveau : cette fois, on ne parle plus de zones humides, mais de « prairie sèche », un écosystème favorable au développement de nos belles orchidées sauvages, si typiques du Lauragais.
Anthony et le groupe Le cheminement se poursuit Orchidées sauvages, observables dès le mois de mai
Nous traversons des zones de gadoue : le lac en l’état, n’est pas praticable toute l’année à pied, sauf si on a des bottes. « Cela aussi fait partie de notre réflexion : soit on laisse le chemin tel quel, et à ce compte-là, le tour du lac n’est pas praticable en hiver, soit nous faisons des gros travaux et nous empierrons le sentier, mais dans ce cas, on perd en zone naturelle. Il faut pouvoir arbitrer ! »
Avec l’aide de l’association Arbres et Paysages d’Autan, 400 arbustes de pays ont été plantés début février sur une zone où se trouve une parcelle agricole en devers. A chaque grosse pluie, la boue ruisselle et se déverse dans le lac, concourant à la sédimentation du plan d’eau. Cette stratégie de plantation est une Solution fondée sur la Nature (SfN), c’est-à-dire une action naturelle et durable : la future haie sera une zone tampon entre la parcelle agricole et le lac et les racines contribueront à l’infiltration de l’eau.
L’eau de pluie dévale les pentes des parcelles agricoles, accentuant l’errosion
Nous arrivons à la queue du lac. Anthony nous explique les travaux qui ont été menés par les équipes du chantier d’insertion : restauration d’une mare sur une parcelle privée, création d’une zone de décantation pour filtrer les boues, et par-dessus tout, instauration d’un programme de suivi des amphibiens sur trois ans en partenariat avec le Muséum d’Histoire Naturelle. « Cette partie du lac est une zone constamment humide, car c’est là que les eaux de pluies ruissellent. D’ailleurs, le chemin du Rivals, qui monte au village de Montgeard est souvent impraticable en hiver » ajoute Patrick.
La mare ou vivier, sur une parcelle privée, a été recreusé afin d’accueillir le trop plein d’eau de la zone de décantation Le roseau commun, Phragmite autralis, est une plante des zones humides. La roselière joue un rôle dans le maintien des berges
Un équilibre fragile
Sur cette partie-là du lac, la végétation est typique des zones humides : roselières à phragmite australis, roselière à massettes, saulaies, aulnaies…et bien sûr la fameuse jussie rampante, dont la présente est avérée partout mais particulièrement en cet endroit-là.
Anthony explique que cette jolie plante à fleurs jaunes est une espèce exotique envahissante (une EEE dans le jardon scientifique). Originaire d’Amérique du Sud, elle prend racine partout sur des points d’eau en France en remplaçant peu à peu la place d’essences locales. Son développement rapide risque à terme d’eutrophiser le plan d’eau : son développement fait obstruction à la lumière du soleil ce qui empêche la vie sous-marine de s’épanouir. « Impossible de l’éradiquer : seul le gel de ses racines permet un affaiblissement de la plante », rajoute Patrick.
Soudain, un cri d’animal retenti : les ornithologues de l’association SONE, qui marchent avec nous, sont formels : il s’agit d’un foulque macroule, un canard qui fréquente souvent les plans d’eau mais qui n’a plus été observé à la Thésauque depuis de longues années. Grâce à un appareil photo spécialisé, Bernard réussi à leur tirer le portrait : c’est un couple de foulques ! Qui sait, peut-être avec un peu de chance, ils donneront une couvée au printemps ?
Joie inattendue : la découverte de ce couple de Foulques macroules barbotant dans les roseaux du lac ! ®Bernard Laviron
Les nichoirs à canards
Les équipes du chantier d’insertion travaillant au lac ont fabriqué quatre nichoirs à canards. Le but est de favoriser la reproduction de ces animaux, qui sont victimes de la prédation des tortues de Floride, présentes en grand nombre dans le lac.
Il n’est pas rare que toute une couvée soit détruite par un prédateur lorsque les œufs sont couvés à même le sol, dans la végétation du bord du lac.
Nichoir à canard, également appelé « Nest tube »
Construire en prenant soin du vivant
Sur le chemin du retour, au lieu-dit les Artis, nous constatons que les arbres ont été abattus. « Le SDIS (Service Départemental d’Incendie et de Secours) a en effet demandé que cette zone, à proximité d’un lotissement, soit déboisée afin de limiter les risques d’incendie lors de période de sécheresse » explique Anthony. Nous prévoyons de replanter quelques arbres et nous profiterons de ces travaux pour décaler le sentier de randonnée un peu plus haut, afin que les berges du lac soient le plus éloignées possibles de la zone de fréquentation. Le but est de laisser la faune en paix »
Une drôle d’impression lorsque l’on chemine à cet endroit, rive droite du lac : avec les sécheresses et canicules récurrentes, les pompiers ont préféré donner des consignes de prévention. D’autres arbres seront replantés.
Il est presque 13h, il est temps de terminer la balade. Nous passons devant un vaste enclos grillagé percé de quelques trous permettant le passage des hérissons, qui accueillera entre mars et novembre, un troupeau de brebis. « C’est de l’éco-pâturage et ça marche très bien » nous dit Patrick. « Ces jolies bêtes pâturent et permettent, sans pétrole et sans main d’œuvre d’assurer un entretien du lieu » .
Le passage des hérissons
Les populations de hérissons connaissent un déclin sans précédent. Parmi les causes principales, le cloisonnement des jardins et des espaces réduit considérablement leur habitat naturel. Le domaine vital d’un hérisson d’Europe peut s’étendre de 10 à 37 hectares : ll peut parcourir 2 à 3 km par nuit pour rechercher sa nourriture ou aller à la conquête d’un partenaire.

Pour en savoir +
Nous remercions tous les participants, associations et organismes qui se sont associés à cette magnifique matinée !
Nous vous invitons à consulter leurs sites internet pour plus d’informations :
- Les Zones humides : www.zones-humides.org
- Territoires engagés pour la nature : engagespourlanature.ofb.fr
- Association SONE (Saint-Orens Nature Environnement) : www.sone.fr
(Merci aux randonneurs pour leurs belles photos !)